Photos prises lors de la représentation du 5 février par Denis Courdier, Le Progrès.
Sabine Carré, professeure de Lettres Modernes au collège Rouget de Lisle de Lons le Saunier, a accepté de nous parler du projet de « classe théâtre » qu’elle coordonne et mène en collaboration avec Jessica Lissandre, professeure documentaliste.
Un projet né d’un besoin manifeste
Lors de la rédaction du projet d’établissement, il a été constaté que nos élèves, bien que pour la moitié citadins, n’accédaient que rarement à la culture et notamment aux spectacles dans des lieux dédiés. De même, nous avions remarqué que le domaine des arts de la scène était méconnu de nos élèves et très souvent sujet à beaucoup de préjugés.
Depuis 3 ans, la classe théâtre réunit entre 24 et 28 élèves chaque année. Ceux-ci s’inscrivent en fin de cinquième et acceptent d’avoir une heure en plus intégrée à leur emploi du temps. Nous accueillons des élèves de tous les niveaux et même parfois d’ULIS.
Sur l’année scolaire, les élèves découvrent les différentes étapes d’une création théâtrale, de la réflexion sur les thèmes à aborder à la production d’une forme sur scène en passant par l’écriture du texte, sa réécriture, ses tests au plateau, sa scénographie, sa mise en scène.
Tout au long de l’année, les élèves se découvrent autrement, apprennent à travailler en équipe mais aussi en autonomie, à développer, proposer des initiatives.
Deux professeurs assurent l’heure de théâtre hebdomadaire mais le projet s’intègre dans la plupart des matières grâce à une équipe enseignante qui accepte de le faire. En effet, pour mieux saisir les spectacles vus, pour alimenter la réflexion lors de l’écriture ou pour étoffer, varier la mise en scène, les professeurs proposent des cours adaptés aux sujets et aux besoins du projet théâtre. Les élèves voient ainsi beaucoup plus l’intérêt de certains apprentissages et leur application pratique. De même, la pratique théâtrale et l’oral s’invitent lors des évaluations dans les matières : les élèves peuvent ainsi restituer de manière plus artistique leurs savoirs.
Une année autour d’un thème
Tous les ans, le projet de la classe est réfléchi en fonction des spectacles choisis par le professeur responsable, des thèmes qui les traversent. Les élèves réfléchiront leurs créations en fonction de cet axe de travail. Les œuvres choisies en français, certaines séquences dans les autres matières permettent de reprendre les sujets ou même l’œuvre mise en scène. Cette année la quête de soi à travers le regard des autres a été choisi. La première production des élèves en février avait pour thème la Covid : Comment vivre un confinement ? Comment vivre avec sa famille ? Comment apprendre à distance ? Comment poursuivre sa vie sociale ? …
Un accompagnement et des partenaires
Depuis le début de ce projet pédagogique, Les Scènes du Jura nous accompagnent, nous proposent des attaches auprès de professionnels, des ateliers correspondant à nos attentes et à nos besoins et des spectacles en soirée, au cœur d’un public non scolaire pour forger une école du spectateur complète. En général, des professionnels de l’écriture, de la mise en scène et du jeu viennent au cours de l’année pour nous accompagner dans notre projet de production. Les élèves ont deux rendez-vous avec le public :
- Un premier en février où les élèves se retrouvent face à un premier public scolaire à la chapelle du collège (en dehors de la période de restriction sanitaire, un public d’adultes, la famille en général, était invité). Ils proposent le fruit d’un travail d’écriture et de mise en scène effectué avec les professeurs, sans l’aide d’intervenants extérieurs.
- Un second avec un public plus large, sur les planches des Scènes du Jura. Il s’agit d’une production plus complexe, aboutissement des rencontres, ateliers, heures de cours effectuées entre décembre et juin.
Mais le théâtre et plus largement les arts de la scène sont l’objet de nombreux exercices tout au long de l’année. Notre partenariat avec les Scènes du Jura nous donne la primeur pour accueillir « le Théâtre c’est dans ta classe ». Grâce aux formations du PAF, nous proposons une matinée d’ateliers créés par l’équipe pédagogigue avec une restitution à la chapelle en début d’après-midi.
Les élèves vont aussi dans les salles de classe pour proposer de courtes créations ou de petites mises en scènes de pièces « classiques ».
Des retours positifs
En fin de troisième, les élèves peuvent présenter leur année de quatrième théâtre à l’oral du brevet. Les résultats pour ceux qui avaient choisi cette possibilité ont obtenu de très bons résultats.
De même, nous avons actuellement des retours de nos premiers élèves ayant intégré la classe théâtre et qui sont en lycée cette année. Ils nous disent qu’ils ont beaucoup plus d’aisance à l’oral et proposent des présentations très originales devant leurs professeurs. De même, ils sont autonomes et gèrent plus facilement leurs travaux surtout avec le problème des cours en distanciel.
Des soutiens nécessaires
Bien entendu, ce projet n’est réalisable que grâce aux aides du département pour la dotation culturelle et à la DAAC qui pour l’heure nous a soutenues pour ce qui est de la partie ateliers. De même, les référents culturels nous aident dans la rédaction de nos projets, nous conseillent quant à la faisabilité, nous orientent vers des professionnels.
Vers une troisième sous le signe du théâtre
Cette année, et à la demande des élèves et des parents, nous proposons pour la première fois une formule « option théâtre ». Nous voulions poursuivre en classe théâtre mais les options en troisième ne permettaient pas de maintenir le groupe dans une seule classe. Ils se retrouvent donc une heure par semaine et ont un projet. Les collègues nous accompagnent toujours même si cela est plus compliqué. Nous avons fait le choix de proposer aux troisièmes de découvrir les arts de la scène sous des aspects différents avec une création en déambulation. L’idée est toujours de travailler autour d’un thème, d’un projet mais de proposer une forme en dehors de la scène « classique ». Les professionnels accompagnent toujours les élèves et les guident dans une production qui les sort de leurs habitudes, de leur zone de confort et encore une fois de leurs préjugés. Nous avons la chance cette année de travailler avec Céline Chatelain qui écrit autour du thème de la machine et de l’Homme et qui se sert de son travail avec les élèves pour alimenter sa propre réflexion.